J’avais consacré un premier billet, puis un second, à la question de la présence de restes humains dans les collections muséales. Ce débat avait été réactivé par la décision de la Ville de Rouen de restituer une tête maorie (décision rejetée un an plus tard par la Cour administrative d’appel de Douai). L’exposition « Our Body » avait également soulevé la question de l’exposition du corps humain.
En juillet 2009, la proposition de loi présentée par Catherine Morin-Desailly était approuvée par le Sénat. L’Assemblée Nationale vient à son tour d’examiner et d’approuver cette proposition de loi qui devrait donc être définitivement adoptée demain 4 mai. Son article premier stipule ainsi que « les têtes maories conservées par des musées de France cessent de faire partie de leurs collections pour être remises à la Nouvelle-Zélande ». Les documents relatifs à cette procédure peuvent être consultés sur le site de l’Assemblée Nationale.
Le débat concernait précisément la question des restes humains conservés dans les collections. Il ne s’agissait pas non plus d’examiner la présence de l’ensemble des restes humains (momies égyptiennes par exemple) mais celle, bien spécifique, des têtes maories. Leur restitution doit permettre aux communautés concernées de donner des sépultures à leurs ancêtres.
Or, la rédaction de cette proposition de loi a relancé la réflexion sur le principe du déclassement. Une nouvelle « commission scientifique nationale des collections » sera chargée d’émettre des recommandations sur le déclassement et la cession (dans le cas des FRAC) de biens culturels. Un rapport devra être remis dans un an. La proposition de loi va donc bien au-delà de la problématique des restes humains et de leur déclassement au cas par cas.
Il s’agit ici de reconsidérer l’inaliénabilité des collections publiques, sujet sensible s’il en est. Dans l’annexe 2 du rapport présenté par Mme Le Moal, on peut lire que la commission actuelle (la CSNCMF) n’a pas eu jusqu’à présent à se prononcer sur le déclassement, « les professionnels du monde des musées [étant] opposés à la remise en cause du principe d’inaliénabilité des collections publiques ». Le rapport de M. Richert est cité dans la présentation du deuxième article du projet de loi : « l’évolution des missions des musées exige des conservateurs une gestion plus dynamique de leurs collections ».
Autant l’on peut se féliciter – dans le cas des têtes maories – d’une décision s’appuyant sur des arguments clairement énoncés, autant l’élargissement de la réflexion sur le déclassement peut aussi inquiéter. Les travaux de la nouvelle commission ne concerneront d’ailleurs pas uniquement les collections des musées mais l’ensemble des collections publiques (excepté les archives et fonds de conservation des bibliothèques). Il faut noter que cette commission ne comprendra pas seulement des professionnels de la conservation mais aussi des élus. Des travaux à suivre !
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